CORDIER, Les Nubiens
Charles-Henri-Joseph CORDIER (1827-1905)
Le Nubien
1848
bronze
h. : 85 cm
© MuMa Le Havre / Charles Maslard
Le Nubien
1848
bronze
h. : 85 cm
© MuMa Le Havre / Charles Maslard
Charles-Henri-Joseph CORDIER (1827-1905)
La Nubienne
1851
bronze
h. : 82 cm
© MuMa Le Havre / Charles Maslard
La Nubienne
1851
bronze
h. : 82 cm
© MuMa Le Havre / Charles Maslard
Élève de François Rude, Charles Cordier (Cambrai, 1827 – Alger, 1905) occupe une place à part dans la sculpture française de la seconde moitié du XIXe siècle. En 1847, sa rencontre avec Seïd Enkess, ancien esclave noir devenu modèle, détermine l'orientation de sa carrière et inaugure son grand dessein, la représentation de la diversité humaine. Son projet de « galerie anthropologique et ethnographique » s'inscrit pleinement dans la démarche ethnographique naissante et rejoint l'objectif des mouvements abolitionnistes et de défense des libertés du milieu du XIXe siècle. Exposé pour la première fois au Salon de 1848 – année où l'abolition définitive de l'esclavage est décrétée par la Deuxième République – sous le titre Saïd Abdallah, de la tribu de Mayac, royaume de Darfour, le buste attire rapidement l'attention. En 1851, l'État en commande un exemplaire pour la nouvelle galerie d'anthropologie du Muséum d'histoire naturelle à Paris, tandis que la reine Victoria en acquiert un second, ainsi qu'un tirage de La Nubienne, qui sont présentés côte à côte à l'Exposition universelle de Londres. Dès 1858, des exemplaires de ces deux œuvres entrent dans les collections du musée du Havre, à l'issue de l'exposition organisée par la Société des amis des arts.
Si ces premiers bustes anthropologiques, tout comme ceux des Chinois, représentent des hommes et des femmes rencontrés à Paris, dès 1856,Cordier voyage en Algérie, en Italie, en Grèce ou en Égypte, allant au-devant de ses modèles. La « galerie ethnographique » qu'il rassemble ne comporte donc pas que des types extra-occidentaux ; on y trouve aussi, à côté de la Romaine du Transtévère ou de la Jeune fille du Morvan, type gaulois, le Type de femme des environs de Paris. Refusant d'utiliser le moulage sur nature, qui selon lui « affaisse les chairs » et « éteint les physionomies », c'est par l'observation et la synthèse qu'il entend exprimer la vérité et la beauté des « types » rencontrés dans ses voyages. En pionnier, il explore également les possibilités offertes par la polychromie grâce aux patines et aux matériaux récemment redécouverts, tel le marbre-onyx en Algérie, et qui permettent des rendus nouveaux et souvent somptueux dans les costumes et les carnations.
Homme profondément généreux, Cordier consacra son art à prôner le respect d'autrui dans sa singularité. En 1862, devant la Société d'anthropologie, il déclarait : « Le beau n'est pas propre à une race privilégiée, j'ai émis dans le monde artistique l'idée de l'ubiquité du beau. Toute race a sa beauté qui diffère de celle des autres races. Le plus beau nègre n'est pas celui qui nous ressemble le plus. » Ce langage, si novateur en 1862, résonne de façon particulière au Havre, d'où partirent en esclavage, pour le seul XVIIIe siècle, près de cent mille Noirs. En faisant l'acquisition de ces deux bustes tout juste dix ans après l'abolition de l'esclavage, la ville affrontait délibérément son passé, tout en rendant hommage au destin tragique de ces milliers d'hommes et de femmes.
Si ces premiers bustes anthropologiques, tout comme ceux des Chinois, représentent des hommes et des femmes rencontrés à Paris, dès 1856,Cordier voyage en Algérie, en Italie, en Grèce ou en Égypte, allant au-devant de ses modèles. La « galerie ethnographique » qu'il rassemble ne comporte donc pas que des types extra-occidentaux ; on y trouve aussi, à côté de la Romaine du Transtévère ou de la Jeune fille du Morvan, type gaulois, le Type de femme des environs de Paris. Refusant d'utiliser le moulage sur nature, qui selon lui « affaisse les chairs » et « éteint les physionomies », c'est par l'observation et la synthèse qu'il entend exprimer la vérité et la beauté des « types » rencontrés dans ses voyages. En pionnier, il explore également les possibilités offertes par la polychromie grâce aux patines et aux matériaux récemment redécouverts, tel le marbre-onyx en Algérie, et qui permettent des rendus nouveaux et souvent somptueux dans les costumes et les carnations.
Homme profondément généreux, Cordier consacra son art à prôner le respect d'autrui dans sa singularité. En 1862, devant la Société d'anthropologie, il déclarait : « Le beau n'est pas propre à une race privilégiée, j'ai émis dans le monde artistique l'idée de l'ubiquité du beau. Toute race a sa beauté qui diffère de celle des autres races. Le plus beau nègre n'est pas celui qui nous ressemble le plus. » Ce langage, si novateur en 1862, résonne de façon particulière au Havre, d'où partirent en esclavage, pour le seul XVIIIe siècle, près de cent mille Noirs. En faisant l'acquisition de ces deux bustes tout juste dix ans après l'abolition de l'esclavage, la ville affrontait délibérément son passé, tout en rendant hommage au destin tragique de ces milliers d'hommes et de femmes.
Vidéo réalisée en interne durant la fermeture du musée dûe à la crise sanitaire du Covid-19 en 2020-2021.
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