Marquet en Normandie

du 22 avril au 24 septembre 2023


Dans la lignée des expositions qu’il a consacrées à des artistes ayant séjourné au Havre et en Normandie (Pissarro dans les ports en 2013, Raoul Dufy au Havre en 2019), le MuMa souhaite se pencher sur l’oeuvre normande de Marquet, occasion de s’interroger, à l’aune des précédentes, sur la question de la série ou encore celle du point de vue chez ces artistes.

Le port omniprésent est le lieu où se joue la simplification des formes, elles-mêmes brouillées par les reflets de l’eau toujours mouvante et par les aléas climatiques comme les effets de brume. Cette exposition permettra d’appréhender l’originalité de Marquet, ce peintre des paysages maritimes et fluviaux sobres et synthétiques.

L’exposition « Marquet en Normandie » présentera environ 60 peintures et dessins issus de prestigieuses collections publiques et privées, françaises et étrangères, pour la première fois réunies. Ces oeuvres dialogueront au MuMa avec celles de ses amis, Dufy, Matisse, Friesz, Camoin, Valtat…
Marquet en Normandie















Les séjours normands de Marquet :
1903 : La Manche (La Percaillerie)
1906 : Le Havre, Fécamp, Trouville, Honfleur
1911 : Honfleur
1912 : Rouen
1927 Honfleur, Vieux Port, environs de Rouen (Canteleu, Croisset, Dieppedalle, La Mailleraye-sur-Seine)
1934 : Le Havre
1937 : Dieppe

 

« Je ne sais ni écrire ni parler mais seulement peindre et dessiner. Regardez ce que j’ai fait. Ou je suis arrivé à m’exprimer ou j’ai échoué, en tout cas, que vous ne compreniez pas, par votre faute ou par la mienne, je ne peux pas faire plus »
 
Albert MARQUET (1875-1947), Le Havre, le bassin, 1906, huile sur bois, 61,4 x 50,3 cm. Le Havre, Musée d’art moderne André Malraux, achat de la Ville avec l’aide de l’État Fonds du Patrimoine, la Région Normandie Fonds régional d’acquisition des musées, l’AMAM, et les entreprises Helvetia, Chalus Chégaray et Cie, CRAM, CRIC, 2019. © MuMa Le Havre / Charles Maslard
Albert MARQUET (1875-1947), Le Havre, le bassin, 1906, huile sur bois, 61,4 x 50,3 cm. Le Havre, Musée d’art moderne André Malraux, achat de la Ville avec l’aide de l’État Fonds du Patrimoine, la Région Normandie Fonds régional d’acquisition des musées, l’AMAM, et les entreprises Helvetia, Chalus Chégaray et Cie, CRAM, CRIC, 2019. © MuMa Le Havre / Charles Maslard
En 2019, le MuMa faisait l’acquisition d’une rare oeuvre fauve d’Albert Marquet datant de son séjour de 1906 au Havre (Le Havre, le bassin). La même année, le musée se voyait donner une toile (Remorqueur, la Seine à Herblay, 1919) par un descendant de la famille Siegfried. Il recevait en 2022, Notre-Dame de Paris sous la neige, 1916 en donation avec réserve d’usufruit.

Albert Marquet (1875 – 1947) est aujourd’hui un artiste particulièrement bien représenté dans les collections du MuMa avec pas moins de 14 toiles et 23 dessins.

Cette forte présence trouve son explication moins dans les achats des conservateurs successifs (hormis Le Havre, le bassin, 1906, seul L’Avant-port du Havre, 1934, a été acquis sur les fonds du musée) que dans le succès que l’artiste rencontra dès le début du XXe siècle auprès des amateurs d’art havrais, qui ont ensuite fait don de leurs collections au musée. C’est notamment le cas des collectionneurs réunis en 1906 autour de la création du Cercle de l’Art Moderne.

Marquet vint au Havre à plusieurs reprises, y peignit, y exposa, favorisant ainsi une proximité avec les collectionneurs, qui, pour certains, achetèrent des oeuvres en nombre. Le legs de Charles Auguste Marande en 1936 fait entrer les premiers Marquet fauves dans les collections municipales avec Le Port de la Ponche à Saint-Tropez, Quai de la Seine à Paris et Vue d'Agay, les rochers rouges. Autre collectionneur havrais, Olivier Senn – dont la collection a été donnée au MuMa par sa petite fille en 2014 –, acquit jusqu’à 15 toiles et quantité de dessins. Georges Dussueil (qui n’en posséda pas moins de treize) ou encore Peter van der Velde, furent également de grands amateurs de la peinture de Marquet.
 
Albert MARQUET (1875-1947), Autoportrait, 1904, huile sur toile, 46 x 38 cm. Mairie de Bordeaux Musée des Beaux-Arts. © Mairie de Bordeaux musée des Beaux-Arts/Frédéric Deval
Albert MARQUET (1875-1947), Autoportrait, 1904, huile sur toile, 46 x 38 cm. Mairie de Bordeaux Musée des Beaux-Arts. © Mairie de Bordeaux musée des Beaux-Arts/Frédéric Deval
Il était donc naturel que le MuMa consacre une exposition à Albert Marquet, en privilégiant un pan inexploré de son oeuvre, à savoir ses séjours en Normandie.

Si l’artiste est de ceux dont l’oeuvre est encore assez peu connu du grand public, cela tient en partie à sa personnalité, discrète et insensible aux honneurs. N’avouait-il pas lui-même : « Je ne sais ni écrire ni parler mais seulement peindre et dessiner. Regardez ce que j’ai fait. Ou je suis arrivé à m’exprimer ou j’ai échoué, en tout cas, que vous ne compreniez pas, par votre faute ou par la mienne, je ne peux pas faire plus ».

Peu porté à l’étude, d’un tempérament timide, Albert Marquet se réfugie très jeune dans le dessin. Son goût pour les paysages maritimes trouve sans doute son origine dans sa naissance, en 1875, à Bordeaux. Il passe son temps libre sur les quais de la ville et ses vacances sur le bassin d’Arcachon.
 
Albert MARQUET (1875-1947), Notre-Dame de Paris sous la neige, 1916, huile sur toile, 81 x 65 cm. Collection particulière - donation au MuMa par Messieurs Rogelio Martinez de Federico et Serge Sadry - sous réserve d'usufruit. © Courtoisie Galerie de la Présidence - Paris
Albert MARQUET (1875-1947), Notre-Dame de Paris sous la neige, 1916, huile sur toile, 81 x 65 cm. Collection particulière - donation au MuMa par Messieurs Rogelio Martinez de Federico et Serge Sadry - sous réserve d'usufruit. © Courtoisie Galerie de la Présidence - Paris
Encouragé par sa mère, Marquet s’installe à Paris en 1890 où il s’inscrit à l’École des arts décoratifs.

Il y rencontre Henri Manguin avant d’intégrer l’École Nationale des Beauxarts en 1894 et retrouve Matisse dans l’atelier de Gustave Moreau.

Son ami, le peintre Francis Jourdain, considère pourtant Marquet comme un autodidacte, sorti indemne de l’enseignement de Gustave Moreau.

« Il ne doit rien qu’à son intelligence – intelligence des maîtres, intelligence de son métier, intelligence de la rue, de la ville ».


 

LES SEJOURS NORMANDS D'ALBERT MARQUET

Voyageur infatigable, Albert Marquet sillonne la côte normande de 1903 à 1937 au cours de sept séjours (Flamanville, Le Havre, Fécamp, Trouville, Honfleur, Rouen, Vieux-Port et Dieppe) où il est entraîné par Henri Manguin puis Raoul Dufy, Henri Matisse, Paul Signac et Félix Vallotton.
Il y trouve un terrain d’expérimentation pour son travail sur la couleur et les motifs qu’il ne cessera de peindre toute sa vie bien au-delà de la Normandie : le monde maritime, le port et ses activités humaines, la plage, les bateaux et avant tout l’eau dont il a gardé le goût depuis son enfance bordelaise.
« Plein-airiste d’atelier », Marquet peint depuis sa fenêtre et invente en Normandie la formule d’un paysage vu en surplomb, à l’abri des regards indiscrets, avec un sens du cadrage, de la synthèse des formes et un goût très sûr de la couleur.


1903 : La Manche (La Percaillerie)
 
Albert MARQUET (1875-1947), Les Falaises de Flamanville,, 1903, huile sur toile, 50 x 60 cm. Collection Peindre en Normandie - dépôt Les Franciscaines - Deauville. © Région Normandie / Inventaire général/Patrick Merret
Albert MARQUET (1875-1947), Les Falaises de Flamanville,, 1903, huile sur toile, 50 x 60 cm. Collection Peindre en Normandie - dépôt Les Franciscaines - Deauville. © Région Normandie / Inventaire général/Patrick Merret
Dès 1903, Albert Marquet découvre la Normandie lors d’un séjour à la Percaillerie, dans la Manche, avec la famille Manguin.

Au Salon d’Automne de 1905, il participe au scandale des fauves, suscité par les toiles aux grands aplats de couleur pure présentées par Camoin, Derain, Dufy, Manguin, Matisse ou Vlaminck. Marquet, qui avait expérimenté avec Matisse une manière fauve dès 1898, est pourtant le plus modéré de ces artistes.




1906 : Le Havre, Fécamp, Trouville, Honfleur
 
Albert MARQUET (1875-1947), Le Havre, 1906, huile sur toile, 65 x 81 cm. Collection Emil Bührle en prêt à long terme à la Kunsthaus - Zurich. © Fondation collection Emil Bührle - Zurich/Kunsthaus Zürich
Albert MARQUET (1875-1947), Le Havre, 1906, huile sur toile, 65 x 81 cm. Collection Emil Bührle en prêt à long terme à la Kunsthaus - Zurich. © Fondation collection Emil Bührle - Zurich/Kunsthaus Zürich
En 1906, il rejoint Raoul Dufy au Havre, puis Fécamp, et Trouville, où les deux jeunes artistes peignent côte à côte, des fenêtres de chambres d’hôtel, multipliant les points de vue sur les bassins, la mer comme les rues pavoisées de la ville ou murs placardés d'affiches publicitaires.

Les deux amis font alors de ces lieux le terrain d’expérimentation privilégié pour leurs recherches picturales et l’usage de la couleur. Les audaces de la période fauve laissent toutefois peu à peu la place à une simplification des formes chez Marquet.


1911 : Honfleur
1912 : Rouen
Albert MARQUET (1875-1947), Rouen, le pont Boieldieu et le quai de Paris par temps ensoleillé, 1912, huile sur toile, 63 x 80 cm. 'Collection particulière. © Courtoisie Galerie de la Présidence - Paris
Albert MARQUET (1875-1947), Rouen, le pont Boieldieu et le quai de Paris par temps ensoleillé, 1912, huile sur toile, 63 x 80 cm. 'Collection particulière. © Courtoisie Galerie de la Présidence - Paris
En juin 1911, il peint à Honfleur où il rend visite à Vallotton, puis au printemps 1912, Marquet se rend à Rouen, rejoint en juillet par Matisse. Son séjour rouennais est une invitation à peindre et à trouver de nouveaux motifs qui l’entraînent dans d’infinies variations sur un même sujet. Marquet exécute ainsi une série de Rouen, quai de Paris, presque identiques, exécutés des fenêtres de l’hôtel de Paris, en plongée, où il introduit des variations dans le ciel ou dans la lumière. Peu importe pour ce voyageur infatigable que les chambres d’hôtel qui l’accueillent soient inconfortables « pourvu que sa fenêtre lui procurât l’espace, la lumière sans lesquels il ne pouvait vivre, et pour satisfaire la malice de son observation, l’animation d’une place ou d’une rue ».


1927 : Honfleur, Vieux-Port, environs de Rouen (Canteleu, Croisset, Dieppedalle, La Mailleraye-sur-Seine)
1934 : Le Havre
1937 : Dieppe
Albert MARQUET (1875-1947), Le Port de Dieppe, 1937, huile sur toile, 46 x 60 cm. 'Collection particulière. © Courtoisie Artcurial - Paris
Albert MARQUET (1875-1947), Le Port de Dieppe, 1937, huile sur toile, 46 x 60 cm. 'Collection particulière. © Courtoisie Artcurial - Paris
En 1927, il est à Vieux-Port, niché dans l’une des dernières boucles de la Seine.

En septembre 1934, il séjourne trois semaines au Havre à l’hôtel Continental, en face de l’entrée du port, à l’endroit même où Pissarro avait peint trente-deux ans plus tôt un paysage désormais disparu.
Enfin en 1937, il revient en Normandie, où il peindra, entre autres, plusieurs vues du port de Dieppe.


 
 
Albert MARQUET (1875-1947), La Plage de Fécamp, 1906, huile sur toile, 50 x 61. Paris - Centre Pompidou - MNAM/CCI - Legs Paul Jamot - 1943. ©RMN-Grand Palais/ Philipp Bernard
Albert MARQUET (1875-1947), La Plage de Fécamp, 1906, huile sur toile, 50 x 61. Paris - Centre Pompidou - MNAM/CCI - Legs Paul Jamot - 1943. ©RMN-Grand Palais/ Philipp Bernard
Très tôt, Marquet met au point ce cadrage en vue plongeante qui caractérise ses paysages, comme pris d’une tour d’observation. Ses séjours en Normandie témoignent par ailleurs de l’évolution de son usage de la couleur.
Si dès 1906, il utilise des couleurs pures et arbitraires – même si la violence est contenue dans ses quelques paysages fauves comme ses rues pavoisées et ses publicités colorées –, sa gamme chromatique s’apaise dès 1911, laissant place à de subtils monochromes gris. Car pour Marquet, le paysage est un véhicule émotionnel, un stimulus de l’imagination et un moyen d’expérimenter les couleurs, le dessin, la composition. Les séries normandes de l’artiste en témoignent peut-être plus particulièrement.
 
Albert MARQUET (1875-1947), Le Quai du Havre, 1934, huile sur toile, 65 x 81 cm. Liège - Musée des Beaux-Arts/La Boverie. © Musée des Beaux-Arts de Liège/La Boverie
Albert MARQUET (1875-1947), Le Quai du Havre, 1934, huile sur toile, 65 x 81 cm. Liège - Musée des Beaux-Arts/La Boverie. © Musée des Beaux-Arts de Liège/La Boverie
Toute sa vie, Marquet a exploré sa propre voie, refusant de théoriser son art : « Pour n’avoir jamais asservi son art à la construction d’un système, pour avoir deviné le ridicule, la vanité des théories, et n’avoir pas fait de pèlerinages d’où l’on revient avec des règles, la peinture d’Albert Marquet donne une impression de peinture heureuse » (Georges Besson, Marquet, Paris, Crès et Cie, 1929, pp. 20-22.).
Il cherche à simplifier le trait, tendant à la synthèse et à l’épure : « Quand il travaillait, il supprimait certains détails, il ne gardait que quelques lignes, et l’on s’apercevait après coup, qu’il avait su choisir celles qui suffisaient à exprimer à la fois son objet et sa propre émotion ». (Marcelle Marquet, op.cit.)


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➤  Albert Marquet - Biographie
 
Exposition initiée par
Annette Haudiquet, directrice du MuMa, conservateur en chef du patrimoine.

Co-Commissaires :
Sophie Krebs, conservateur général du patrimoine et commissaire scientifique de la rétrospective Marquet en 2016 au musée d'art moderne de Paris,
Michaël Debris, attaché de conservation, coordinateur des expositions au MuMa.

Avec l'aide du conseil scientifique du Wildenstein Plattner Institute préparant le catalogue raisonné de l'artiste.

 
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Cette exposition est présentée à l'occasion de la 7e édition d’Un Été Au Havre, saison estivale culturelle.

 
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